Avec l'arrivée du printemps, vient l'éclosion des fleurs.
Au Japon, le O-Hanami est une fête traditionnelle séculaire qui célèbre la floraison des cerisiers.
Cette coutume nippone débute à la période Nara (710-794), sous l'influence de la culture chinoise. On dit que l'Empereur du Japon avait pour habitude de se déplacer spécialement pour contempler les floraisons éphémères du printemps. C'est à cette époque que les Japonais se mettent à admirer les fleurs. Et les premiers pruniers fraichement importés de Chine faisaient, tout comme en Chine, l’objet d’une grande admiration lors de leur floraison. C’était, à l'époque, les fleurs de Ume (pruniers) qui étaient les plus vénérées.
C’est en fait l’Empereur Saga qui instaura cette célébration florale à l’ère Heian (794-1185), en la rendant festive à la Cour Impériale, et ce fut au tour des cerisiers d’être honorés.
Plus tard, le Hanami s’étend à la caste des Samouraïs, avant de gagner le cœur de toute la population.
Hanami signifie "regarder les fleurs", et plus précisément, les fleurs de cerisiers.
Cette coutume poétique consiste à contempler la floraison des Sakuras (fleurs de cerisiers), qui débute chez nous, à la fin mars et ne dure qu'une dizaine de jours.
Au Japon, la saison du hanami varie en fonction du climat. Chaque année les premières fleurs apparaissent à une date différente. Dans les îles du sud du pays, où il fait très chaud, les premières fleurs de sakuras sont visibles dès le début de l’hiver, vers fin décembre. Mais dans le nord du pays, il faut attendre le mois de mai pour voir fleurir les cerisiers.
Cette tradition japonaise célèbre la fin de l’hiver et l’arrivée du printemps sur l’archipel nippon.
Elle vient d’une croyance shintoïste voulant que les esprits des dieux viennent, chaque année, habiter les petites fleurs roses des cerisiers.
Les paysans japonais croyaient qu’au printemps, les dieux des champs s’installaient dans les cerisiers en fleurs. Ils instaurèrent donc un jour de repos pour se rendre sous les cerisiers pour honorer et prier les dieux. Comme le veulent les rites shintoïstes, les paysans leur apportaient à boire et à manger et partageaient ainsi leur repas avec les divinités, assis sous les cerisiers en fleurs… La floraison des cerisiers était également une date importante qui annonçait le début des travaux des champs, la plantation du riz.
Depuis, la tradition d’apporter des offrandes aux pieds des cerisiers s’est transformée en véritable fête nationale.
« Si l'on me demande de définir l'esprit du Japon, je dirai Fleur du Cerisier montagnard, embaumant sous le soleil du matin »
disait le poète du XVIIIe siècle Motoori Norinaga.
Cette floraison est le symbole de la fragilité de l'existence. Elle représente la beauté éphémère et le temps qui passe, rappelant ainsi la valeur de toute chose.
Mais elle est aussi l'incarnation de la beauté, avec sa floraison luxuriante et décorative.
Elle est aussi l'incarnation du renouveau, puisqu'elle représente l'éveil printanier, la naissance dans le cycle de la vie.
La fleur de cerisier joue un rôle important dans la culture japonaise. Fleur nationale du Japon, elle est utilisée depuis des siècles dans le symbolisme de la poésie, dans l’art japonais classique, dans les estampes, les mangas, les films...
Le thème du Printemps et sa symbolique a été une grande source d'inspiration pour les artistes. Botticelli, Arcimboldo, Boucher, Manet, Gauguin, Klimt et bien d'autres, ont traités le sujet en peinture.
Au cours de la deuxième moitié du XIXe siècle, le Japon a exercé une grande influence sur l'art occidental, offrant des thèmes nouveaux, de nouvelles techniques, de nouveaux cadrages et points de vue. Les artistes européens ont été largement influencés par la culture japonaise: les nymphéas de Claude Monet, les amandiers en fleurs de Vincent Van Gogh...
Sans vouloir, ni pouvoir d'ailleurs, me comparer à ces grands maîtres de la peinture, j'ai eu envie, moi aussi, de célébrer le printemps.
C’est tout naturellement que, au printemps 2020, ravigotée par la joie de recouvrer un brin de liberté (après 2 mois de confinement), j'ai peint mon premier tableau sur le sujet, inspirée par un haïku* de Suyu Takano.
Au ciel s’en vont les pétales de cerisiers d’une seule envolée
Suyu TAKANO
Mon interprétation du haïku de Suyu TAKANO, c'est la sérénité d'un instant, couchée dans l'herbe, un soir de printemps, sous une brise légère... des pétales roses virevoltants sur fond de voûte céleste...
J'ai retravaillé le sujet du Printemps ces dernières semaines, et je vous présente aujourd'hui avec humilité, la série Cerisiers en fleurs, que j'ai traité telle une allégorie de la vie.
J'ai souhaité retranscrire la vie qui reprend après des mois de sommeil. La vie statique laisse place au grouillement. Tout s'anime, tout reprend vie. La faune, la flore s'affaire à préparer ce nouveau cycle.
Le mouvement de la nature qui s'éveille, l'air passant à travers les branches des arbres, diffusant des effluves sucrées, les couleurs franches des fleurs attirant les insectes,... sous un ciel toujours bleu.
Vous pourrez découvrir d'autres tableaux sur le sujet, lors de prochaines expositions.
Alors, à très vite...
*Le haïku est un poème bref (17 syllabes réparties en 3 vers), né au Japon à la fin du 17ème siècle. C'est une forme de poésie, en lien avec la nature et inspirée d'une émotion dans l'instant.
"Le haïku n'est pas dans la lettre, mais dans le cœur".
Matsuo Munefusa, dit Bashô (1644-1694)
Si seulement venait le printemps
dans mon cœur déjà
fleurit le cerisier
Sumitaku KENSHIN
Il est la capture de l’instant, dans ce qu’il a de singulier et d’éphémère. Par l'allusion et le non-dit, il célèbre la beauté contenue dans les plus simples choses de la vie.
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